Travailler oui, mais dans quel cadre ?

Date de publication : 1er octobre 2020

Des contrats courts pour répondre aux besoins de flexibilité des entreprises, des jeunes qui créent leur start-up… demain, tous précarisés ou ubérisés ? Pas si sûr… L’emploi salarié fait de la résistance !

Image d'illustration, crédit photo ci-après

Un large recours aux contrats précaires

Dans une économie où les fluctuations d’activité peuvent être brutales et où l’avenir est incertain, de nombreuses entreprises souhaitent ajuster avec facilité le nombre de leurs salariés, à la hausse comme à la baisse, en fonction de la conjoncture. C’est une des raisons du recours aux contrats précaires : CDD (contrats à durée déterminée), missions d’intérim. Une pratique qui s’applique en général aux emplois les moins qualifiés, les plus aisément substituables. Mais elle peut également concerner des tâches très qualifiées (conseil en informatique, gestion, marketing), pour lesquelles les entreprises peuvent aussi obtenir la flexibilité recherchée en recourant à des sociétés sous-traitantes, par exemple pour le nettoyage de leurs locaux, la gestion de la cantine, l’accueil ou la sécurité. C’est aussi le cas pour des missions plus stratégiques : gestion de l’informatique ou pilotage de nouveaux projets industriels. Altran, par exemple, est une ESN (entreprise de services du numérique) qui embauche chaque année plusieurs milliers de jeunes ingénieurs intervenant au sein de grandes entreprises industrielles.

Culture ou cueillette ?

Certes, la majorité des embauches se fait via des contrats précaires, mais ce flux concerne pour une bonne part des contrats de très courte durée, conclus en très grand nombre. Ce qui masque la bonne résistance du CDI (contrat à durée indéterminée). Les emplois stables demeurent, en effet, la forme dominante d’emploi, puisque 85 % des salariés en France sont en CDI ou fonctionnaires. Et si le développement de l’économie collaborative se traduit par un essor du travail indépendant, celui-ci demeure limité.

En fait, les employeurs cherchent ­souvent à fidéliser leurs salariés, car ces derniers détiennent des savoir-faire précieux pour l’entreprise. Il a souvent fallu du temps pour les former. Alors, une fois rentables, autant éviter qu’ils ne partent chez un concurrent ! Les entreprises "cultivent" ainsi leur main-d’œuvre faute de pouvoir "cueillir", sur le marché du travail, des salariés immédiatement opérationnels dans leur entreprise ! D’ailleurs, l’efficacité des organisations dépend aussi de la qualité des collectifs de travail. Ces derniers associent des compétences diverses et peuvent être déstabilisés si leurs membres changent trop rapidement. Enfin, chacun s’investit mieux dans son travail quand il sait que son effort sera récompensé sur la durée !

Créer son entreprise

Pendant ce temps, de plus en plus de candidats se lancent dans la création d’entreprise, que ce soit par choix ou, parfois, faute de mieux. En 2018, plus de 700 000 entreprises ont ainsi été créées en France (hors secteur agricole), soit 17 % de plus qu’en 2017, selon l’Insee. Dans les deux tiers des cas, il s’agit d’entreprises individuelles et, parmi celles-ci, les deux tiers sont créées avec le statut d’auto­entrepreneur (désormais "micro-­entrepreneur") qui suppose une activité limitée, souvent cumulée avec un emploi salarié.

Les motivations sont diverses, mais il faut, avant de se lancer, avoir un projet, s’assurer de sa viabilité économique et disposer d’un minimum de connaissances en gestion. Selon l’activité, il faut aussi réunir un capital plus ou moins important (notamment pour les équipements et les locaux à mobiliser, ainsi que pour le nombre de salariés nécessaire dès le départ). Les créations d’entreprises les plus nombreuses se font dans le transport et l’entreposage, le commerce, la restauration et les différents services aux entreprises, parfois sous la forme de franchises (utilisation d’une marque détenue par un groupe propriétaire contre rémunération).

On compte aussi de nombreuses créations dans les services à la personne : coiffure, esthétique, aide à domicile… mais aussi dans l’artisanat du bâtiment. Dans ce dernier secteur, il est possible, pour qui a la qualification requise, de créer une entreprise sans mobiliser un capital important en se limitant à réaliser des petits chantiers. En revanche, le nombre de créations d’entreprises dans l’industrie ou le high-tech demeure limité, compte tenu des compétences et des capitaux nécessaires.

Se mettre à son compte : un choix, des contraintes

Pourquoi créer son entreprise ? Pour être indépendant, voir le résultat de son travail, mais aussi, parfois, faute d’avoir trouvé un emploi salarié. En outre, nombre d’entreprises préfèrent nouer des contrats avec des travailleurs indépendants plutôt que d’embaucher des salariés pour des raisons de coût et de flexibilité. Le niveau du chômage leur permet de trouver des personnels qualifiés, extérieurs à l’entreprise, et dont elles seront parfois le seul client.

Parallèlement, nombre de jeunes aspirent à travailler de manière plus autonome, plus libre, quitte à accepter une certaine précarité. L’évolution des outils de communication favorise également la remise en cause du lien salarial : on peut partager à distance les mêmes informations sur le cloud, travailler avec son consultant en visioconférence, utiliser son ordinateur portable, etc. La précarité observée dans certains métiers, due à la nature de l’activité (spectacle) ou à sa saisonnalité (hôtellerie restauration), s’étend ainsi à de nouveaux secteurs : communication, journalisme…

Économie collaborative : miracle ou mirage ?

Facilitée par Internet, l’économie collaborative peut fournir un complément de revenu. Le covoiturage, par exemple, offre au propriétaire du véhicule la possibilité de partager le coût de ses déplacements. On peut aussi louer sa tondeuse à gazon. Le plus fréquent demeure la mise à disposition d’un logement vacant ou d’une chambre inoccupée pour des touristes. Une activité qui peut se révéler très rentable.

En revanche, pour un site de transport urbain à la demande, comme Uber, le temps de travail est souvent long et les revenus peu élevés une fois les cotisations payées (pour s’assurer un minimum de protection sociale).


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