Revivez le tchat sur les métiers de la documentation
Date de publication : 12 février 2018
Rechercher, trier et valoriser toutes sortes de documents… les fonctions des documentalistes sont multiples. Ce secteur vous intéresse ? Particulièrement le domaine de la culture et du patrimoine ? Céline Latil, responsable du centre de documentation du MAC VAL, a répondu à toutes vos questions le 7 mars 2018. Revivez le tchat.
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Cher internaute, soyez attentif à la date de publication de la retranscription du tchat qui correspond au jour du témoignage de l'invité(e). Certaines formations ou diplômes peuvent avoir évolué au gré des réformes. N'hésitez pas à utiliser notre moteur de recherche pour connaître les formations qui mènent à ce métier et les modes d’admission actuels.
Le Modérateur : Bonjour et bienvenue sur ce tchat Onisep consacré aux métiers de la documentation.Nous accueillons aujourd'hui Céline Latil, responsable du centre de documentation du MAC VAL. Elle se tient prête à répondre à toutes vos questions. N'hésitez pas ! Bon tchat !
En savoir plus sur l'invitée : Céline Latil
Diplômée en histoire de l’art de l’Université Paris Ouest Nanterre et en muséologie de l’Ecole du Louvre, Céline Latil a travaillé dans différents domaines patrimoniaux : archéologie, récolement de collections (pour la ville de Paris), recensement de patrimoine (en Picardie), archives (Archives départementales de l’Aisne), documentation (pour le Ministère de la Culture)…
Elle a rejoint l’équipe du MAC VAL musée d’art contemporain du Val-de-Marne à Vitry-sur-Seine en avril 2004 afin de créer et de développer le centre de documentation, qu’elle dirige depuis lors. Ce dernier est le premier service documentaire de musée en France à avoir été pensé pour tous les publics (y compris les enfants), en accès libre. Il présente d’importants fonds sur la scène artistique française des années 50 à nos jours.
Céline Latil : Bonjour à tous !
Lilou_alex : Quelles études il faut faire pour faire documentaire ?
Maelane : Quelles études pour être documentaliste ou bibliothécaire ?
Céline Latil : Pour les formations initiales, il y a beaucoup de possibilités : DUT Info-Com option information numérique dans les organisations ou Métiers du livre et du patrimoine, ensuite des licences professionnelles et des masters à l’université. Plusieurs écoles sont spécialisées : EBD, IRTD, INTD-CNAM, ENSSIB… Voir la fiche métier : http://www.onisep.fr/Ressources/Univers-Metier/Metiers/documentaliste
Isa86 : Quelle est votre formation ?
Céline Latil : J’ai une maîtrise en histoire de l’art et le diplôme de muséologie de l’école du Louvre. Je n’ai pas de formation initiale en documentation : j’ai fait une formation qualifiante (et non diplômante) alors que j’étais en poste. Lorsque j’ai intégré le MAC VAL, j’ai suivi le cycle de bibliothécaire territorial à l’INSET de Nancy (Institut National Spécialisé d'Etudes Territoriales - CNFPT)
crr : Quelle différence entre archiviste et documentaliste ? Y a-t-il des documentalistes ailleurs qu'en musée ?
Céline Latil : L’archiviste est chargé de collecter, étudier, classer et restaurer les archives et également les communiquer au public. Ces archives proviennent des administrations, des entreprises, des associations ou des particuliers.
Le documentaliste cherche de l’information et réalise des services et produits documentaires : veille documentaire, synthèses bibliographiques spécialisées, revues de presse, etc. Ces recherches et produits sont toujours réalisés en fonction d’une demande.
Il y a des documentalistes dans beaucoup de domaines : dans le privé (entreprises, cabinets d’avocats, banques, chambres de commerce...), comme dans le public (écoles, ministères, collectivités territoriales…).
petronino : Existe-t-il des remises à niveau pour des documentalistes qui ont interrompu leur carrière ?
Céline Latil : Je ne sais pas s’il existe des formations estampillées "remise à niveau" en documentation. Je vous conseille de vous renseigner :
auprès de l’ADBS,
de l’INTD-CNAM, qui propose des formations diplômantes ou certifiantes et même des MOOC (http://intd.cnam.fr/)
Utilisateur5_1 : Puis-je être documentaliste en faisant une autre fonction ?
Céline Latil : Dans beaucoup de petites structures, les fonctions documentation sont associées à la médiation ou à l'accueil du public. Dans certains musées, ce sont les équipes de conservation qui documentent l'activité de l'établissement. Elles sont parfois aussi associées au service communication. La fonction documentaire n'est pas toujours reconnue au sein des établissements, certaines secrétaires étant chargées de ces missions.
Dodouce : Bonjour, mon fils rêve de devenir archiviste audiovisuel, mais il souffre de dysorthographie : cela risque-t-il de le pénaliser dans les études nécessaires ? Merci de votre réponse.
Céline Latil : Cela va être compliqué pour lui, car il y a beaucoup d'écrit. Cela demandera plus de travail et de temps. Mais si c'est son rêve, il faut qu'il s'accroche !
Syl : Bonjour. Je connais la documentaliste de mon CDI. Mais dans une entreprise, c'est quoi le métier ?
Céline Latil : C'est la même chose, si ce n'est que le public n'est pas le même. Nous travaillons plus sur de la veille documentaire. En entreprise, les enjeux sont commerciaux et concurrentiels (avoir l'information avant son concurrent).
ines : Bonjour. Quelles sont les qualités et les capacités nécessaires pour travailler dans la documentation ?
Céline Latil : La première est la rigueur. Il y a beaucoup de normes à respecter. La persévérance, ensuite : ne jamais laisser partir un usager sans réponse à sa question, ou sans l'avoir redirigé vers un autre service plus à même de lui répondre. Il faut aussi des capacités d'écoute, pour bien comprendre les demandes et y répondre au mieux. Aimer le contact avec le public est important, de même qu’être à l'aise à l'oral comme à l'écrit. Nous sommes sur un métier de service et de support. Nous sommes là pour aider et accompagner nos usagers. Des capacités de synthèse et une bonne maîtrise de l'écrit pour le traitement et la réalisation de produits documentaires sont attendues.
Mick43 : Que faut-il comme diplôme pour être documentaliste dans un CDI ? Merci.
Céline Latil : Après une licence, il faut avoir le Master MEEF (métiers de l'enseignement de l'éducation et de la formation). Il faut ensuite passer le Capes documentation qui permet de devenir professeur documentaliste.
Rose_bonbon77 : Bonjour, j'aimerais savoir s'il est facile de trouver du travail actuellement pour les documentalistes.
Tomtom : Peut-on être documentaliste dans le privé ou seul le public offre aujourd'hui du travail ?
Céline Latil : Ce secteur ne compte pas parmi ceux qui recrutent le plus, actuellement. Dans le public, il y a très peu de postes, le contexte actuel de réduction des dépenses publiques n’est vraiment pas favorable. On peut être documentaliste aussi dans le privé (grandes entreprises, secteur bancaire, cabinets d'avocats...).
OcM : Aujourd'hui, on dirait que c'est indispensable d'avoir des compétences numériques pour faire ce métier. Quel avenir pour ce métier ? Quelles formations pertinentes pour ce métier ?
Céline Latil : Oui, il faut avoir des compétences en informatique documentaire, notamment maîtriser les logiciels de bibliothèque et de gestion électronique de documents. Il faut aussi savoir gérer des portails documentaires qui sont de véritables sites Internet. Nous sommes aussi un peu webmestres. Nous gérons des bases de données. Il faut être en capacité de dialoguer avec les informaticiens de nos structures.
Adrien : Bonjour, est-il utile d'être bilingue ? J'ai déjà vu des annonces dans ce sens pour des entreprises étrangères notamment.Merci
Céline Latil : Oui, c'est mieux de maîtriser au moins l'anglais. Au musée, nous recevons beaucoup d'artistes et de touristes étrangers. Dans mon équipe, nous sommes en capacité d'échanger aussi en italien et en espagnol.
Gégé77 : C'est mieux d'avoir un DUT plus une licence ou un master directement ?
Céline Latil : Cela dépend des missions et des postes que vous seriez susceptible d'occuper.
Z@@m : Bonjour, existe-t-il, pour des enseignants du 1er degré souhaitant changer d'orientation, des moyens "internes" d'accéder à ces métiers ? Si oui, lesquels et à quel niveau d'étude ? Merci.
Céline Latil : Il doit exister le concours interne pour passer le Capes documentation pour travailler dans les CDI des établissements scolaires. Mais je n’en sais pas plus. Il faut voir avec votre académie.
Clarisse : Pouvez-vous nous décrire votre métier au quotidien ? Je suis curieuse de savoir comment vous travaillez au sein d'un musée... Merci!
Céline Latil : Nos journées alternent entre traitement des documents (catalogage des livres et des revues, par exemple), veille documentaire (sur l'actualité en lien avec le musée) et la recherche pour accompagner les besoins de nos utilisateurs. Nous sommes à la disposition des équipes du musée pour répondre à tous leurs besoins de recherche et d'information. Nous sommes d'ailleurs régulièrement interrompus dans nos tâches pour répondre aux demandes.
Nous faisons aussi des produits documentaires : dossiers, bibliographies, revues de presse... Nous couvrons des domaines allant de l'art contemporain à la conservation et restauration des œuvres, en passant par le droit et la gestion administrative et financière.
Nous travaillons aussi beaucoup avec les artistes. C'est l'avantage de travailler dans un musée d'art contemporain. Nous avons des fonds assez spécifiques : photothèque, fonds audiovisuels, mais aussi archives (nous conservons l'archive privée du critique d'art à l'origine de la collection du musée).
Nous participons aussi à la médiation : nous recevons des groupes pour des visites conçues avec nos collègues de l'équipe des publics, entre le centre de documentation et les salles d'exposition.
Mathilde33 : Est-ce que tous les grands musées ont un service de documentation comme le vôtre ?
Céline Latil : Tous les grands musées ont un centre de documentation, mais pas comme le nôtre : les fonds, les conditions d’accès et de consultation, les produits et les services documentaires, les moyens humains et financiers divergent d’un établissement à l’autre.
Nous sommes ouverts en accès libre à tous les publics : certains ne sont accessibles que sur inscription pour les étudiants et les chercheurs. Nous faisons aussi de la médiation, c’est assez rare. Nous sommes une équipe de 6 personnes : à part dans les très grands musées, il n’y a souvent qu’une ou deux documentalistes par établissement (quand il y en a). La fonction documentaire est rarement reconnue. Et je connais des institutions de renommée qui n’ont pas ou plus de centre de documentation.
Ginette : Aimez-vous votre métier, quel est votre public ?
Céline Latil : Oui, j'adore mon métier. Il est très enrichissant. J'apprends tous les jours, chaque nouvelle exposition et chaque nouveau projet pédagogique est l'occasion de rencontres humaines et artistiques, avec les artistes et le public. On a le sentiment d'être utile pour nos collègues et les chercheurs.
Notre public est très divers, car le centre de documentation est ouvert à tous, en accès libre, ce qui est d'ailleurs une exception dans les musées. Nous recevons autant les visiteurs et les familles que les collégiens et bacheliers du quartier, qui viennent réviser dans notre salle de lecture. Nous préparons les visites avec les enseignants. Nous recevons aussi des étudiants, des chercheurs et des professionnels de l'art, public plus classique des centres de documentation. Nous recevons des groupes allant des crèches (2-3 ans) et des scolaires aux centres de loisirs, centres sociaux et centres de quartiers. Nous faisons aussi du hors les murs : nous présentons des livres d'artistes auprès des enfants hospitalisés.
Sach94 : Bonjour, avez-vous toujours travaillé dans des musées ? Merci
Céline Latil : Non, j'ai aussi travaillé dans un service de recensement du patrimoine, dans un service archéologique et en archives départementales.
J'ai également travaillé dans plusieurs services du ministère de la Culture, dont la DAP (délégation aux arts plastiques) et à l'INP (institut national du patrimoine), en tant que documentaliste. Toutefois, mon objectif professionnel a toujours été de travailler comme documentaliste dans un musée.
Nico : Bonjour, pouvez-vous m'expliquer ce que l'on entend par ingénierie documentaire ? Merci
Céline Latil : Un ingénieur documentaire est chargé de mettre en place une chaîne de production documentaire, d'en suivre le processus, de l'évaluer et de le contrôler, et de rendre compte du travail réalisé. Il est chargé de mettre en place des services d'information ou documentaires.
Cela nécessite des compétences en conduite de projet, souvent stratégiques pour les entreprises ou les institutions publiques. Vous pouvez consulter le site de l'INTD-CNAM, qui prépare au titre professionnel de chef de projet en ingénierie documentaire et gestion des connaissances.
Mathilde33 : Vous avez combien de métiers différents dans votre service documentation de votre musée ?
Céline Latil : Plusieurs : notre travail au sein du musée nécessite une grande polyvalence ! Nous réunissons les métiers de documentaliste spécialisé en art contemporain, de photothécaire, d’archiviste, de webmestre, de chargé d'accueil, de médiateur.
Quand on est une petite équipe, on se partage les tâches en fonction des besoins, et on est en capacité de se remplacer en cas d'absence de l'un d'entre nous.
Romain : Gérez-vous également une photothèque ?
Céline Latil : Oui. Nous gérons la photothèque du musée, qui est en cours d'informatisation.
Nafissa : Est-ce qu'il est possible de travailler à son compte (comme auto-entrepreneuse) dans ce métier ?
Céline Latil : Oui, il existe des prestataires indépendants pour de la fourniture de produits documentaires ou de veille documentaire. Il existe aussi des cabinets de consultants pour accompagner en ingénierie documentaire sur de gros projets. Mais aussi pour des tâches plus classiques de documentation.
Roman : Bonjour, existe-t-il une association de documentalistes ? Merci
Céline Latil : Oui, l'ADBS, association des professionnels de l'information et de la documentation : http://www.adbs.fr
Esther : Est-ce qu'il faut forcément obtenir un concours pour obtenir un CDI ? Est-ce que sinon on est forcément contractuel ?
Céline Latil : Dans la fonction publique, il faut être titulaire d'un concours pour occuper un poste de documentaliste. Les contractuels sont recrutés pour des missions qui peuvent être plus ou moins longues : informatisation d'un fonds, remplacement d'un agent absent, nouveau projet nécessitant un accompagnement particulier...
olivia : Avez-vous des partenariats avec d'autres centres de documentation ?
Céline Latil : Oui, nous travaillons beaucoup en réseau et avec un esprit d'entraide. Quand nous n'avons pas les ressources dans un domaine, nous sollicitons nos collègues d'autres structures. Notre équipe travaille beaucoup avec le Centre de ressources documentaires de l'INP, mais aussi avec tous les centres de documentation des musées d'art contemporain et FRAC (fonds régionaux d'art contemporain).
Zoé : Bonjour, quel est le salaire moyen d'un documentaliste ?
Ludivine : Est-ce qu'on gagne bien sa vie dans ce métier ?
Céline Latil : Cela dépend de l'établissement dans lequel on travaille : public ou privé, taille de la structure, missions confiées, niveau de responsabilité et d'encadrement. Les salaires varient beaucoup. Un adjoint du patrimoine au musée doit gagner autour de 1 300 euros net par mois. Un responsable d'équipe ou de centre de documentation, entre 2 500 et 3 000 euros net. Ces chiffres concernent les établissements publics.
Ludovic : Combien de personnes fréquentent votre établissement chaque jour ?
Céline Latil : Le musée accueille environ 70 000 visiteurs par an. Au centre de documentation, environ 7 000 usagers, internes ou externes, viennent nous voir chaque année.
Le Modérateur : Nous prenons les dernières questions...
olivia : Quel est l'aspect de votre métier que vous préférez ?
Camille : Bonjour. Qu'est-ce qui vous plaît le moins dans votre métier ?
Céline Latil : L'aspect que je préfère est le contact avec le public, l'aide et la formation à la recherche. Comme dans tout métier, certaines tâches plus répétitives sont moins plaisantes que d'autres... Mais on s'en accommode car le reste est passionnant !
Mat : Est-ce qu'il vous arrive encore de vous balader dans votre musée et d'y découvrir de nouvelles choses ?
Céline Latil : Oui, je vais régulièrement me "balader" dans les salles pour voir les œuvres. Pour découvrir les dernières œuvres achetées, ou commandées à des artistes. Je travaille depuis 14 ans au musée et je n’ai pas encore vu toutes les œuvres de la collection stockées en réserve !
Nous organisons deux expositions temporaires par an. A cette occasion, nous empruntons des œuvres à d’autres institutions (musées, FRAC…) ou collectionneurs privés, français ou étrangers. C’est l’occasion de les voir rassemblées au même endroit pour un temps assez court : il faut en profiter !
De plus, nous avons la chance de travailler avec des artistes vivants que le public a l’occasion de rencontrer lors de programmations spécifiques : visites, conférences, performances, concerts… Du coup, le personnel du musée en profite également : quel plaisir d’assister au concert de Jean-Luc Verna lors du dernier jour de son exposition, à la visite guidée de l’exposition par l’artiste ou même de participer à la performance d’Esther Ferrer…
De toute façon, cela fait partie de notre travail : pour bien renseigner le public, il faut bien se documenter. Et quoi de mieux que de voir les œuvres ou de rencontrer les artistes ?
Le Modérateur : Le tchat se termine. Céline, le mot de la fin ?
Céline Latil : Merci pour toutes vos questions. Je vous invite à venir au prochain vernissage au musée, le 13 avril : l'exposition consacrée au travail de Kader Attia, "Les racines poussent aussi dans le béton". À bientôt au centre de documentation, et bonne fin de journée à toutes et à tous !
Le Modérateur : Merci à toutes et à tous de votre participation.Nous remercions également Céline pour ses conseils et ses réponses.